Quelques régulations de vitesse sur les magnétophones utilisant un moteur à courant continu à balais
- xaviermotti
- 29 août 2022
- 8 min de lecture
Dernière mise à jour : 11 août
Post mis en ligne le 29-8-2022. Mis à jour le 03-01-2024 puis le 11-8-2025.
1- Nécessité de la régulation de vitesse.
Remarque importante.
Sur le Web, le mot "régulateur" désignant un dispositif de commande de moteur est souvent employé à la place du mot "variateur".
Le « variateur » permet de modifier la vitesse de rotation du moteur (c’est un système en boucle ouverte) alors que le « régulateur » permet de maintenir constante la vitesse de rotation du moteur quelque soit les perturbations et en particulier les fluctuations du couple résistant (il fonctionne en boucle fermée) : se sont deux systèmes différents à savoir que le régulateur utilise bien un variateur mais réalise aussi une mesure la vitesse de rotation.
Le défilement de la bande à vitesse constante est un impératif sur tous les magnétophones reel to reel et K7.
En effet, l'oreille est sensible à de très faibles variations de timbre, par exemple :
- dans la gamme tempérée on trouve la fréquence du DO(0) = 32,70 Hz et celle du DO#(0) = 34,65 Hz ;
l'oreille est parfaitement capable de distinguer ces deux notes alors que l'écart de fréquence n'est que de 6%
- en musique toujours, certaines échelles (arabe, grecque antique) utilisent le quart de ton ;
cet écart est toujours parfaitement perceptible par notre oreille ; traduit en terme de fréquence, deux notes séparées d'un quart de ton ont des fréquences qui varient dans les proportions de 1,0293 soit 2,93 %.
Alois Haba : https://www.youtube.com/watch?v=FDs7ve1uGbg utilise les quart de tons dans sa musique et le piano utilisé à dû être réaccordé pour ce concert.
On comprend donc que la régulation de la vitesse de défilement de la bande magnétique doit être réalisée avec une précision bien supérieure à 3% !!
Dans le cas des magnétophones, ces variations de vitesse de rotation prennent les noms anglais de "wow and flutter" soit "pleurage et scintillement" en français.
Le pleurage est une variation lente de la vitesse de rotation, par exemple sur un tour de bobine (variation de couple).
Le scintillement est une variation rapide de la vitesse de rotation, par exemple sur un tour d'axe moteur (décentrage de la poulie).

Appareil de mesure du pleurage et scintillement (wow & flutter)
2- Organigramme d'une régulation "industrielle".
Remarque importante.
La "régulation" renvoit à un système qui cherche à maintenir constante une grandeur physique (en sortie) le plus proche possible d'une valeur recherchée (en entrée) appelée "consigne" qui a été fixée à l'avance.
"L'asservissement" renvoit à un système qui cherche à maintenir l'égalité entre la grandeur de sortie et la grandeur d'entrée appelée "consigne", cette dernière pouvant évoluer au cours du temps.
La régulation désigne donc la recherche d'une valeur statique, c'est-à-dire constante et l'asservissement désigne un système capable de suivre les variations de la consigne.
La régulation de vitesse fait appel à une chaîne ayant une contre-réaction et utilisant un capteur : on compare la mesure avec la consigne.
Le schéma général d'une régulation est le suivant :

Les régulations industrielles utilisent des correcteurs nommés PID pour proportionnel, intégral et dérivé.
Le correcteur proportionnel ne permet pas de réguler la vitesse en étant exactement à la valeur de la consigne. On peut s'en approcher mais plus on augmente le coefficient, plus il y a risque d'instabilité.
La correction intégrale, permet d'annuler l'erreur, mais augmente aussi l'instabilité et ralentit la réaction du système.
La correction dérivée permet d'augmenter la vitesse de réaction du système.
3- La régulation de vitesse des moteurs à courant continu à balais (brushed DC motor) dans les magnétophones à bandes.
Aujourd'hui, certains moteurs de ces magnétophones arrivent en fin de vie et leur remplacement est impossible du fait de l'arrêt de la fabrication et l'épuisement des stocks.
Comprendre ces régulations permet de les modifier pour les adapter à des moteurs actuels.
La majorité des magnétophones à bandes (TEAC, PIONEER, PHILIPS) utilisent un circuit de régulation basé sur le même principe.
Voici trois schémas ayant des points communs.
3.1- Le Pionner RT909 utilise un circuit spécialisé : le M51970L ou le M51971 associé au moteur dme45bt9-20.

1 est connecté avec 2 ou 3 selon le mode "normal" ou "reverse"
L'autre borne du moteur est connectée avec une source de 24V : cela est réalisé par un pont à 4 transistors qui assure les deux sens de rotation.
En vitesse 19 cm/s c’est le réseau C21-C22 sont chargées par R21-R220-R230-VR21.
En vitesse 9,5 cm/s les bornes 4 et 5 sont connectées ensemble par S702-3 et le condensateur équivalent est C21-C22-C23-C24, sa valeur est le double de C21-C22 il est chargé par R24-R250-R260-VR22 les impulsions sont plus lentes.
8 est l'alimentation du circuit : 15V sur le RT909 (18V max pour le M51970L).
7 ou 6 permet de faire l'ajustement des vitesses 9,5 ou 19 cm/s et le réglage du "pitch control"
Cette structure est la même, au circuit intégré près à celle utilisée pour les Teac des séries X.
Image : synoptique interne du circuit régulateur M51970L.

C'est ce circuit régulateur qui nous donne le principe général de plusieurs régulations de vitesse trouvées sur les magnétophones.
Dans cette chaîne fonctionnelle les blocs ont les rôles :
"Amplifier" est en fait un trigger.
"Mono multivibrator" est un monostable qui génère des impulsions de durée constante à chaque période, c'est la mise en forme de la mesure.
"Integrator" est un générateur de rampe, la constante de temps de l'intégrateur est la consigne.
La tension est limitée par les remises à zéro régulière du bloc "overshoot prevention circuit" lorsque la consigne est atteinte.
"Current amplifier" permet le pilotage du transistor de sortie. Il est associé à une limitation de courant.
3.2- Les Philips N4420, N7150 et N7300 entre autres (service manual p15) utilisent une régulation à partir de transistors discrets et le moteur 4822 361 20177
Image : schéma de la régulation de vitesse Philips.jpg

Potentiel A = 27,5 V Potentiel C = 12,8 V Potentiel H = 12,1 V
en 1. Le générateur G2 délivre une tension alternative de fréquence proportionnelle à la vitesse de rotation et d'amplitude + 1V.
En 2. On récupère l'alternance négative. Elle vient bloquer régulièrement le transistor TS18.
En 3. TS18 fonctionne en bloqué-saturé. Le signal est transformé en rectangle ayant une fréquence image de la vitesse de rotation.
En 4. Le signal est dérivé par C64 et les impulsions basses viennent charger C63.
En 5. C63 et R99 à R212 jouent le rôle de l'intégrateur. On dispose d'une tension proportionnelle à la vitesse de rotation.
En 6. On décale la tension pour la comparer à celle de la diode zéner D5. La différence est amplifiée par TS16 - TS17 - TS19 et pilote le moteur.
Une baisse de vitesse du moteur entraîne une baisse de fréquence en 2 et 3.
Il s'en suit une baisse de la tension du point 5.
Il y a alors entrée en conduction de TS17. Et finalement TS16 et TS19 amplifient le courant de commande du moteur.
3.3- Les Teac de la série X (X-1000, X-10, X-7 notamment) utilisent une régulation à partir des 2 comparateurs contenus dans le NJM2030 ou équivalents (LM393-D) et le moteur EM1446.
Image : régulation d'un magnétophone Teac

4- Fonction des différents blocs de la régulation desTeac.
4.1- Le générateur F.G. : rectangle brun.
F.G. signifie : frequency generator. Le moteur EM1446 génère un signal sinusoïdal de tension + 1Veff environ.
Sa fréquence est directement liée à la vitesse de rotation du moteur par la relation :
f (Hz) = 30 . n (tr/min) / 60 = n(tr/min) / 2
Il y a 30 périodes par tour.
4.2- Le circuit IC1 bornes 1,2,3 : rectangle cyan.
Récupère le signal sinusoïdal du F.G. et le met en forme. C'est un trigger qui restitue en sortie (broche 1) un signal rectangulaire de même fréquence et d'amplitude 0-24V
4.3- Le réseau C4-C5-R5-R6
Est un dérivateur qui transforme le signal rectangulaire en impulsions de durée constante : il remplit la fonction de monostable et assure la conduction ponctuelle de Q1.
4.4- Les réseaux R8-R18-C6 ou R7-R17-C6 : rectangle vert
Fonctionnent en intégrateur. Sont deux circuits qui chargent C6 à tension constante.
En agissant sur la valeur de R8-R18 ou R7-R17 ou en agissant sur la valeur de C6, on modifie la vitesse de charge de C6.
Si on augmente les valeurs des résistances R8-R18 ou R7-R17, le condensateur met plus de temps à se charger.
Si on augmente la valeur de C6, l'effet sera le même.
La tension VC6 est remise à 0 à chaque impulsion sur la base de Q1.
4.5- Le circuit IC1 bornes 5,6,7
Est un comparateur de tensions.
La tension sur l'entrée 5 est la référence : elle peut être modifiée avec le "pitch".
Si le moteur ralentit, alors la tension VC6 a plus de temps pour croître. Elle est présentée sur l'entrée 6 de IC1 dépasse alors la tension fixée sur l'entrée 5 de IC1.
Il s'en suit que la sortie 7 de IC1 bascule à 0, rendant Q2 puis Q3 et Q4 conducteurs.
Le moteur reçoit alors une impulsion de commande qui l'accélère.
4.6- Le Q2-Q3-Q4 : rectangle orange.
Est un amplificateur de courant. Il apporte la puissance au moteur.
4.7- Le circuit R16 - C8 : rectangle violet
Donne la durée des impulsions de conduction de Q3-Q4. La valeur de C8 doit être augmentée si on utilise un moteur de plus grande inertie.
Je m'avance peut-être, mais je pense que ce réseau agit aussi au moment de la mise sous tension du magnétophone car l'expérience m'a montré qu'une valeur insuffisante empêche le démarrage du moteur.
Les composants les plus critiques pour la précision du système sont ceux du 4.3 et du 4.4, auquel on peut rajouter le pont diviseur R9, R10.
L'élévation de température à l'intérieur du magnétophone et celle de Q4, peut être responsable d'une dérive de vitesse.
5- Fonctionnement de la régulation des Teac.
Nommons no la vitesse de rotation recherchée pour le moteur. Supposons une baisse de vitesse du moteur (par augmentation du couple résistant) : on aura alors n < no.
Le générateur F.G. fournit une tension de fréquence plus faible f < fo (peut importe la valeur de cette tension).
Après mise en forme, le comparateur IC1 (broches 2,3,1) fournit un rectangle de fréquence plus faible f < fo.
Le dérivateur C4-R5-R6 fournit moins d'impulsions à la base du transistor Q1.
Le transistor Q1 court-circuite moins souvent le condensateur C6 de l'intégrateur et la tension aux bornes de C6 augmente légèrement.
Le comparateur IC1 (broches 5,6,7) (entrée 5 = e+ entrée 6 = e-) voit sa tension de sortie passer à 0 car VC6 = Ve- > Ve+
Le transistor Q2 devient passant.
Les transistors Q3 et Q4 deviennent passant à leur tour avec une pointe de conductivité dû au réseau C8-R16, la tension aux bornes du moteur augmente et agit en sens inverse de la cause.
Le réseau C8-R16 devra éventuellement être modifié si l'on change de moteur (augmenter C8 par exemple si le nouveau moteur a plus d'inertie).
6- Effet de la modification des valeurs des composants sur la platine de régulation Teac : TG-673194V-1
Augmentation de R8-R18 ou de R7-R17 = diminution de la vitesse.
Augmentation de C6 = diminution de la vitesse.
Diminution de R9 = augmentation de la vitesse ;
Diminution de R10 = diminution de la vitesse ;
Diminution de R13 = augmentation du courant moteur (couple / réactivité)
7- Caractéristiques d'une "bonne" régulation.
Une régulation efficace vérifie les points suivants :
- elle est indépendante (ou presque) de la tension d'alimentation, laquelle peut varier dans une large proportion ;
- elle est précise : l'écart entre vitesse et consigne est faible ;
- elle réagit rapidement ;
- elle est apériodique critique : ce comportement est celui qui permet d'être le plus rapide sans dépassement ;




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